Exhorter - Se laisser exhorter

le 25 octobre 2014

Si de véritables exhortations ont toujours été une denrée rare, il y a carrément pénurie de nos jours où l’iniquité s’accroît et l’amour du plus grand nombre de croyants se refroidi (Matthieu 24,14). Cette situation est significative de l’état d’esprit qui règne dans les milieux religieux qui asservissent les âmes à des règles, devoirs, contraintes, lois et autres prescriptions.  Dès qu’une assemblée se forme, elle est organisée selon le modèle que les autres églises (concurrentes) ont copié dans l’ancien Testament. Y a-t-il un inconvénient à cela ? Oui ! Et non le moindre, en tout cas pour les fidèles. L’inconvénient c’est l’absence d’exhortations. Malheureusement cela ne préoccupe guère les dirigeants qui, s’érigeant en successeurs des sacrificateurs de l’ancien Testament, s’en accommodent très bien. Les cultes et autres réunions sont alors dominés par des prédicateurs qui exercent leurs talents en lisant des exposés et enseignements faisant appel à la raison et la soumission des fidèles.  L’apôtre Pierre mentionne ceux qui « font les seigneurs à l’égard de ceux qui leur sont échus en partage » (1 Pierre 5,3). Ce sont les discours et monologues de ces « seigneurs » qui empêchent les fidèles de mettre en pratique cette exhortation :  Faisons attention les uns aux autres pour nous stimuler dans la charité et les bonnes œuvres (Hébreux 10,24).  Nous voilà au cœur d’un des problèmes majeur. Les églises, en imitant les us et coutumes de l’ancien Testament, n’ont pas de place pour l’exhortation. Et pour cause : le mot « exhortation » et ses dérivés est une expression du nouveau Testament (où elle figure cinquante-neuf fois contre deux dans l’ancien Testament). C’est écart illustre à lui seul le contraste entre les deux Alliances. C’est ce même contraste que nous retrouvons entre : la Loi de Moïse et la Loi de Christ ; entre le devoir et l’amour ; entre le « tu dois » et le « tu peux ».  Les exhortations sont si inhabituelles que lorsqu’un prédicateur s’enhardi à en donner une, les fidèles la ressentent comme un reproche et une critique. Et pourquoi ? Parce que celui qui exhorte les autres à faire ce qu’il ne fait pas lui-même, laisse les fidèles sur leur faim. Et comme un enfant de Dieu ne peut vivre sans éprouver un réel besoin d’être exhorté, plusieurs prennent la coutume de déserter les assemblées. Exhorter est à l’opposé de tout ce qui peut s’apparenter avec exiger, dominer, imposer, contraindre, obliger, réclamer ou revendiquer. Aussi est-il impossible d’exhorter les autres sans avoir un cœur qui aime le bien et qui hait le mal. Une exhortation qui ne jaillit pas d’un coeur rempli de bonté, de sollicitude, et d’amour, n’est pas retenue par ceux qui l’entendent. Exhorter c’est encourager, inciter, inviter, aiguillonner, pousser et stimuler quelqu’un par des paroles ou par des lettres. L’apôtre Paul utilisait l’exhortation sous toutes ces formes, il exhorta même les Ephésiens à se rappeler de ses exhortations : Souvenez-vous que durant trois années, je n’ai cessé nuit et jour d’exhorter avec larmes chacun de vous (Actes 20,31).  Mais nous savons aussi que les exhortations les meilleures ne produisent de l’effet que lorsque la semence tombe dans une bonne terre… Il faut que ceux qui l’entendent, la retiennent dans un cœur honnête et bon, pour qu’elle porte du fruit avec persévérance (Luc 8,15). Les chrétiens de Rome avaient cette disposition de cœur et reçurent ce magnifique témoignage : Vous êtes pleins de bonnes dispositions, remplis de toute connaissance, et capables de vous exhorter les uns les autres (Romains 15,14).