Prisonnier de Christ

A cause de cela, moi Paul, le prisonnier de Christ pour vous païens... si du moins vous avez appris comment je fais part de la grâce de Dieu qui m'a été confiée pour vous. (Éphésiens 3, 1-2)
C'est spécialement à l'apôtre Paul que Dieu avait fait la grâce d'annoncer l’Évangile hors des frontières d’Israël. Et c'est avec tout son cœur et sans se ménager qu’il s'employait tel un prisonnier – « le prisonnier de Christ » - à faire connaître aux Grecs comme aux barbares, aux savants comme aux ignorants (Romains 1, 14) « la grâce de Dieu » d’une novelle dispensation. Comme l’Alliance faite avec le peuple d’Israël n'avait rien amené à la perfection, Dieu l’abrogea en raison de sa faiblesse et son impuissance face à la nature humaine, « la chair ». A sa place, il proposa à la communauté humaine une nouvelle Alliance avec une espérance meilleure pour permettre aux hommes de mieux servir les desseins de Dieu. (Hébreux 7, 18-19)
Sous l’ancienne Alliance, l'humanité ne voyait en l’Éternel Dieu qu’un Roi majestueux et sévère qui juge, châtie et condamne impitoyablement les pauvres pécheurs qui lui déplaisait. (cf. Psaume 59) Désormais, sous la nouvelle Alliance, Jésus-Christ fait découvrir à l’humanité l’Éternel Dieu comme un Père, un Dieu de toute consolation (2 Corinthiens 1, 3) dont il put dire :
Celui qui m’a vu a vu le Père. (Jean 14, 9)
La meilleur espérance qu’apporte la nouvelle Alliance est synonyme de « la grâce de Dieu » qui permet, à ceux qui la contractent, d’atteindre la perfection annoncée par Jésus-Christ dans le Sermon sur la montagne :
Soyez donc parfaits, comme votre Père céleste est parfait. (Matthieu 5, 48)
C’est aussi la perfection que Jésus proposa à l’homme riche qui lui demanda ce qu’il devait faire de bon pour s’assurer la vie éternelle :
Si tu veux être parfait, va, vends ce que tu possèdes, donne-le aux pauvres, et tu auras un trésor dans le ciel. Puis viens, et suis-moi. (Matthieu 19, 21)
Viens, et suis-moi ! Le salut en Jésus-Christ est ouvert à tous ceux qui estiment que leur dépendance de la puissance du péché est une injustice. C’est à cause de son abaissement et de son obéissance jusqu'à la mort, même la mort de la croix, que Christ fut qualifié de proposer aux hommes de le suivre. Bien que la perfection soit désormais accessible à tout homme, la « grâce de Dieu » n’est cependant imposée à personne. Mais un jour ou l’autre chacun doit s'interroger soi-même s'il veut suivre Christ ou garder son héritage adamique ; s'il veut continuer à vivre sous la servitude du péché ou se laisser en affranchir par Jésus-Christ.
Le dessein de « la grâce de Dieu » est l’édification de la maison de Dieu : l’Église - le temple de la nouvelle Alliance. Une édification qui s’opère durant le temps de grâce, avec ceux qui se laissent sauver de leur vaine manière de vivre, et qui s’achève lorsque la plénitude des païens convertis y sera associée. La maison de Dieu est une œuvre collective qui se construit non pas avec des propres justes mais avec des pécheurs graciés ; des hommes et des femmes de toutes nations qui, avant de naître de nouveau, étaient incrédules et impies. Jésus-Christ est la pierre angulaire de cette maison spirituelle et les apôtres en sont le fondement :
En lui tout construction s’ajuste et grandit en un temple saint, dans le Seigneur ; en lui, vous aussi, vous êtes intégrés à la construction pour devenir une demeure de Dieu, dans l’Esprit. (Éphésiens 2, 21-22)
Nul n'appartient à la maison de Dieu par héritage. Seuls ceux qui suivent les traces de Christ y sont intégrés et, comme des pierres vivantes, ajustées avec les saints et fidèles qui les ont précédés. Ces pierres vivantes sont tous des « prisonniers de Christ » qui, à l’exemple de Paul, prennent soins des autres comme une nourrice prend un tendre soin de ses enfants. (1 Thessaloniciens 2, 7)
A mesure que cette maison évolue, elle reflète la gloire de Dieu et illumine les nations au point qu’elles ne pourront faire autrement que de marcher à sa lumière et les rois de la terre d’y apporter leur gloire. Lorsque la maison sera achevée, Dieu aura de nouveau sa demeure parmi les hommes.
Il habitera avec eux, et ils seront son peuple, et Dieu lui-même sera avec eux. (Apocalypse 21, 3)
S’il est évident que l'on ne trouvera dans la maison de Dieu « aux cieux » ni querelles, ni injustice, ni tristesse, ni favoritisme ou ce qui déplaît au Seigneur, il est tout aussi manifeste que rien n'est jamais parfait durant le temps où s’édifie la maison de Dieu « sur terre ». Aussi longtemps que l’Église n'est pas achevée et enlevée dans les cieux on trouvera dans les meilleures assemblées, des vases d'un usage vil.
Dans une grande maison, il n'y a pas seulement des vases d'or et d'argent, mais il y en a aussi de bois et de terre ; les uns sont des vases d'honneur, et les autres sont d'un usage vil. (2 Timothée 2, 20)
Et comme nul n’est un « vase d'honneur », sanctifié, utile à son maître et propre à toute bonne œuvre sans être également une œuvre parfaite de Dieu, de même l'Esprit Saint ne peut demeurer dans ces « vases d’un usage vil » que sont ceux qui continuent à se souiller tout en se disant chrétiens. Pour rester utiles au Seigneur, nous devons surveiller notre sanctification et ne pas nous laisser contaminer par le contenu des « vases d’un usage vil ». Mais comme nous ne devons pas empêcher ces personnes à entendre l’Evangile, nous devons supporter dans nos réunions « vases d’un usage vil » patiemment jusqu'à la fin du temps de grâce où les anges de Dieu feront le tri pour bannir de sa maison tout ce qui n'est pas bon :
Quand le filet est rempli, les pêcheurs le tirent ; et, après s'être assis sur le rivage, ils mettent dans des vases ce qui est bon, et ils jettent ce qui est mauvais. (Matthieu 13, 47-49)
D’aucuns s'imaginent appartenir à « la maison de Dieu » tout en transgressant le nouveau commandement de Christ :
Aimez-vous les uns les autres ; comme je vous ai aimés, vous aussi, aimez-vous les uns les autres. (Jean 13, 34).
A ces croyants manque évidement la révélation de « la grâce de Dieu » que l'apôtre cherchait à partager avec les saints et fidèles. Au lieu de chercher à plaire au prochain et contribuer à l'édification de tous, ils défendent leurs propres intérêts et s'entre-déchirent. Bien des prédicateurs recherchent ce qui est grand aux yeux des hommes - ce qui frappe la vue, et méprisent ainsi ce qui est insignifiant, petit et faible : choses que Dieu utilise justement pour confondre les sages. Heureusement, ces « rêveurs de grandeur » ne réussissent que rarement.
Dans les communautés où « la grâce de Dieu » est à l’œuvre, les frères et sœurs s'édifient réciproquement dans un même esprit et une même pensée. Ils se connaissent par leur nom, s’apprécient mutuellement et apprennent, selon le dessein de Dieu, à former une véritable habitation en Esprit.
C’est de lui, et grâce à tous les liens de son assistance, que tout le corps, bien coordonné et formant un solide assemblage, tire son accroissement selon la force qui convient à chacune de ses parties, et s'édifie lui-même dans l'amour. (Éphésiens 4, 16)
Ceux qui ont un ministère particulier l’exercent avec désintéressement et non en dominant, sachant que le développement des brebis ne se fait qu'avec la grâce de Dieu. C’est sur l’amour que s’édifie la maison de Dieu. Quant aux églises et assemblées où la foi, l'espérance et l'amour, la bonté, la patience et la paix ne règnent que dans les sermons, elles ne sont rien d'autres que des filles de Babylone.

K. Woerlen (publié le 25 juillet 2018)